Une main (1933),
Charles-Ferdinand Ramuz, éditions Rencontre.

Lecture par David Lemaire,
samedi 25 juin à 18 heures

Un matin de janvier, Ramuz glisse sur une plaque de verglas et se casse un bras.
Cet accident anodin modifie les gestes les plus simples, manger, écrire, allumer une cigarette. L’attelle imposante, fabriquée par le menuisier du village, modifie la perception de l’espace de l’appartement, les meubles deviennent des embûches à tout déplacement.

« Je suis couché sur le dos. Où ai-je mis mes cigarettes ? Je n’arrive pas à me souvenir si, en sortant de la boutique, j’ai fourré le paquet dans ma poche ou si je le tenais à la main. En ce dernier cas, je l’aurais lâché en tombant, et il va falloir que je le retrouve. Je vois que je suis resté longtemps étendu dans la neige avec paresse comme un promeneur sur le gazon d’un talus ; je tourne la tête à droite et à gauche, j’essaie ensuite de m’asseoir. Et c’est à cette intention que j’ai recours à mes deux mains, mais alors je vois que je n’en ai plus qu’une. Tout de suite, la droite accourt docilement, elle est devant moi, je la vois, mais l’autre ? Je n’ai plus de main gauche. J’ai beau la solliciter : elle ne répond pas. Et j’éprouve à présent une grande douleur dans l’épaule, mais au-dessous, il n’y a que néant. » p. 13